La Montagne - Jeudi 15 octobre 2009

http://www.lamontagne.fr/editions_locales/haute_loire/et_si_nos_poubelles_valaient_de_l_or_@CARGNjFdJSsHERwCChs-.html

Et si nos poubelles valaient de l'or?

Le projet de la filiale de Suez Environnement d'enfouir 40.000 tonnes de déchets au Sud du Puy-en-Velay ne freine en rien le projet de Pizzorno de traiter 80.000 tonnes à l'Ouest du département.

Patricia Cerinsek patricia.cerinsek@centrefrance.com

À l'Ouest, rien de nouveau. Pizzorno continue de porter son projet de centre de traitement de 80.000 tonnes de déchets à Saint-Beauzire, quand bien même la société SITA parle d'enfouir 40.000 tonnes entre Cayres et Seneujols, au sud du Puy-en-Velay. Et que l'incinérateur de Clermont est relancé depuis que le préfet a signé l'arrêté d'autorisation d'exploiter?

Les interrogations, pourtant, sont légion. Et pour cause. Si l'incinérateur porté par Vernéa, filiale de Suez Environnement, se charge des déchets du Puy-de-Dôme et du Nord de la Haute-Loire, si SITA, filiale de Suez Environnement également, s'occupe des déchets du Centre du département (*), que reste-t-il pour Pizzorno ? Le groupe varois table sur un gisement de 80.000 tonnes venant essentiellement de l'Ouest et du Centre de la Haute-Loire?

« C'est un scénario dont ils (les dirigeants des filiales de Suez, N.D.L.R.) ne sont pas les décideurs », résume Jean-Philippe Dessaulx, responsable développement et valorisation Auvergne à Pizzorno. « Il y a deux plans départementaux en révision, du Puy-de-Dôme et de la Haute-Loire. Les seuls capables de répondre sont les Conseils généraux ».

La « solution globale » avancée par Suez, soit l'incinérateur à Clermont, le centre d'enfouissement à Cayres-Pradelles, convaincra-t-elle ? Comme le résume Vincent Borel, directeur développement à SITA, « on propose le chaînon manquant ».

Mais bien malin qui peut aujourd'hui dessiner la carte du traitement des déchets de demain. Et, en attendant, l'heure tourne. Le centre d'enfouissement de la Communauté de communes de Saugues a fermé le 30 juin dernier. Depuis, et en attendant de contractualiser pour évacuer les déchets ailleurs, la décharge du Moulas stocke. « Le centre devait fermer en 2006, rappelle Olivier Rascle, directeur de la Communauté de communes du Pays de Saugues. Il a bénéficié d'une prolongation jusqu'en 2009 en attendant la solution départementale. Laquelle n'est toujours pas là ! » Alors, faute de débouchés, les déchets de la Haute-Loire vont de plus en plus loin. Dans le Puy-de-Dôme, l'Allier, la Loire, la Drôme. Mais, là aussi, la coupe est pleine. Et les préfets ferment les portes frontalières. « La logique des plans départementaux prévoit une gestion des déchets au plus près de la source », rappelle Olivier Rascle.

De fait, la proposition de Pizzorno à Saint-Beauzire ne pouvait pas mieux tomber? jusqu'à ce que l'opposition de la population et des élus se critallise. Le projet de SITA ? Là aussi, levée de boucliers des élus de Cayres-Pradelles.

« Au Puy-en-Velay, ils ne savent pas quoi faire de leurs déchets ! pointe un proche du dossier. Ils étaient prêts à partir avec Pizzorno ». Mais Suez, bien installé dans la Loire voisine, n'a pas tardé à saisir l'opportunité de poser un pied en territoire altiligérien. « Nous sommes très surveillés par nos concurrents, notamment des grands groupes », résume Jean-Philippe Dessaulx pour qui « il n'a jamais été question d'abandonner le projet à Saint-Beauzire ». D'ailleurs, le dossier de demande d'autorisation du centre, qui prévoit tri et valorisation, devrait atterrir sur le bureau du préfet avant le 1er janvier 2010. Pour, si le calendrier est respecté, démarrer en 2012.

Même tempo du côté de SITA avec une levée de rideau annoncée vers 2011-2012. Course contre la montre pour les deux géants sur le marché des déchets ? Partie de poker menteur ? SITA dit n'avoir aucun élément sur le dossier Pizzorno. Quand Pizzorno dit ne pas connaître le projet de Cayres-Pradelles? Reste que, pour se disputer les parts du gâteau, le marché doit être juteux. Et la bagarre féroce.

Car le site de SITA, au lieudit « Ronzet » entre Cayres et Sénéujols, Pizzorno le connaît bien. « C'est un site que l'on avait étudié, poursuit Jean-Philippe Dessaulx, et que l'on n'a pas retenu ». Zone AOC de la lentille verte, réserve d'eau qu'est le plateau du Devès, ce sont aussi les arguments que mettent en avant les opposants au projet.

(*) Soit des secteurs des Monts du Forez, de l'Emblavez, de l'agglomération du Puy-en-Velay, du Pays de Saugues et de Cayres-Pradelles.