Delphine Lévi Alvarès, du Centre national d'information indépendante sur les déchets (Cniid), dénonce l'opacité du secteur des ordures ménagères et la montée en puissance des cas de corruption.

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Le secteur des déchets demeure le terrain de jeu d'entreprises controversées. Ici, le centre de traitement du Roumagayrol, à Pierrefeu du Var.

L'Union européenne classe la gestion des déchets parmi les cinq secteurs les plus propices à la corruption. Pourquoi ?  Car c'est très rentable et très complexe, donc opaque. Avant, les mafias donnaient dans la traite humaine. Aujourd'hui, elles font dans le déchet. Dans ce secteur, la corruption a même tendance à empirer. Réduction des coûts oblige, les contrôles des installations ou des bordereaux à l'entrée des décharges se raréfient. Or l'une des tricheries répandues consiste à ne pas déclarer tous les volumes stockés.  Un groupe comme Pizzorno Environnement, en situation de quasi-monopole dans le Var, a déjà été condamné pour diverses infractions. Cela ne l'empêche pas de remporter de nouveaux contrats...  Parce que ses dirigeants dépensent beaucoup d'argent en communication. Ils ont les moyens de se faire passer pour des gens bien. Un exemple : le 9 avril dernier, un cadre de Pizzorno a vanté "l'exemplarité" de son entreprise lors d'une conférence parlementaire à la maison de la Chimie, à Paris, organisée en partenariat avec... Pizzorno ! Quand on connaît la réputation pour le moins controversée de ce groupe, c'est ahurissant de le voir financer un tel événement (coprésidé par la sénatrice UDI Chantal Jouanno, ex-secrétaire d'Etat à l'écologie)..  Les collectivités qui confient la gestion de leurs déchets à ces entreprises "controversées" ne sont-elles pas les premières responsables ?  Les élus des petites communes n'ont pas forcément les compétences en interne pour négocier. Ils font confiance à l'entreprise qui se propose. Dès lors, celle-ci devient toute puissante. En 2011, un rapport de la cour des comptes a conclu que, dans la très grande majorité des cas, les contrats de gestion des déchets étaient à l'avantage des prestataires au détriment des contribuables [qui paient notamment la taxe d'enlèvement des ordures ménagères. Le secteur souffre-t-il d'un manque de concurrence ?   Le faible nombre d'opérateurs est à la fois la cause et la conséquence du système actuel. Car les pratiques d'un groupe comme Pizzorno, mélange de pressions et de relations étroites avec les élus, empêchent l'implantation de nouveaux acteurs sur son territoire.  Que préconisez-vous ?   On ne changera les choses qu'en formant les élus. Peu s'intéressent aux déchets car c'est un domaine très technique. Il faut leur montrer qu'ils possèdent un réel pouvoir. Eux seuls peuvent ainsi promouvoirla réduction du volume d'ordures ménagères. Aucun industriel ne le fera à leur place. 

Lire le dossier "Var. Déchets. Révélations sur le système Francis Pizzorno" dans notre édition régionale en kiosque mercredi 28 mai.

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